A l'occasion de la sortie du film "Momo" le 27 décembre, Catherine Frot a répondu à quelques questions.
Un soir, en rentrant chez eux, Monsieur et Madame Prioux découvrent avec stupéfaction qu’un certain Patrick s’est installé chez eux. Cet étrange garçon est revenu chez ses parents pour leur présenter sa femme. Les Prioux, qui n’ont jamais eu d’enfant, tombent des nues… D’autant que tout semble prouver que Patrick est bien leur fils. Patrick est-il un mythomane ? Un manipulateur ? Les Prioux ont-ils oublié qu’ils avaient un enfant ? Madame Prioux, qui souffre de ne pas être mère, s’invente-t-elle un fils ?
On connaît votre passion de comédienne pour le théâtre. Connaissiez-vous le travail de Sébastien Thiéry, l’auteur de la pièce « Momo » et coréalisateur du film ?
Catherine Frot : Bien sûr : j’étais allée voir « Comme s’il en pleuvait » en 2012 avec Evelyne Bouix et Pierre Arditi. Mais malheureusement je n’avais pas pu voir « Momo » sur scène car au même moment je jouais « Fleur de cactus ». En revanche, j’ai évidemment lu le texte de Sébastien dans sa version théâtre, puis le scénario du film, et j’ai vu les changements importants qu’il y avait apportés. Son adaptation cinématographique entraîne l’histoire et les personnages ailleurs, en développant notamment le personnage d’André Prioux, interprété par Christian Clavier. Du coup, je trouve que mon rôle, celui de Mme Prioux a gagné en sentimentalité, en émotion.
C’est cette dimension-là qui vous donne envie de vous lancer dans ce projet de cinéma ?
Catherine Frot : Oui absolument. Je savais aussi que Christian Clavier avait déjà été choisi pour jouer André Prioux. Et puis, ce qui m’a tout de suite intéressée, c’est la dimension absurde de l’histoire : le fait que le récit et les personnages basculent vite dans un univers presque irréel.
Vous parlez de l’absurde : il devient soudainement très réaliste dans l’histoire et c’est tout le pari du film.
Catherine Frot : Oui, on doit adhérer à quelque chose d’insensé, qui n’existe pas !
Mon personnage est l’emblème de cela. Ce qui est troublant, c’est que pas mal des femmes que j’ai interprétées au cinéma évoluent dans cette dimension-là : des sortes de bulles de folie…
Cela signifie-t-il que vous avez ça en vous ?
Catherine Frot : Je ne sais pas mais ça me questionne en tout cas ! Si je repense à ODETTE TOULEMONDE, à MARGUERITE ou à Yolande dans UN AIR DE FAMILLE, je me rends compte que ce sont des femmes qui fonctionnent dans l’affabulation d’une autre vie. Apparemment, les réalisateurs m’imaginent ou m’envisagent parfois dans ce registre-là. C’est exactement ça dans MOMO : Laurence Prioux veut croire que cet homme qui fait irruption dans sa vie est bien son fils alors qu’elle n’a pas eu d’enfant.
Vous le dites, Mme Prioux est une femme qui n’a pas été mère… Vous qui l’êtes, êtes-vous allée puiser dans votre vécu pour construire ce personnage ?
Catherine Frot : Non parce que c’est avant tout de la comédie pure et je ne crois pas que pour jouer cela il faille aller chercher trop loin en soi. Cela ne m’empêche pas de me laisser aller à l’émotion, voire à me laisser déborder par elle quand je joue un personnage.
De quelle manière avez-vous travaillé avec vos deux coréalisateurs, Sébastien Thiéry et Vincent Lobelle ?
Catherine Frot : Les tâches étaient bien réparties entre eux deux : Sébastien se concentrait sur les comédiens et Vincent sur la mise en scène, l’aspect visuel du film. Il fallait trouver la balance entre la comédie, portée par Christian et l’émotion qui est au coeur du texte, car sur le fond, cette histoire-là raconte des choses qui vont bien au-delà du rire. La vraie difficulté, et ce que le film parvient à dégager il me semble, c’est un juste milieu entre la sensibilité et la comédie. C’est un mélange qui peut paraître incongru mais il est cohérent avec ce que raconte MOMO. En fait, c’est un film bâti sur des sentiments et des personnages opposés et l’on sait tous que parfois, ce qui s’oppose s’attire… Le plus et le moins peuvent déclencher la foudre : Christian dans la folie comique démesurée et moi dans l’émotion et la suspension !
Comment justement avez-vous vécu vos retrouvailles de cinéma avec Christian Clavier, 35 ans après vous être croisés dans « Les babas-cool » ?
Catherine Frot : Il y avait de la gourmandise pour moi à me confronter à la puissance de son jeu comique hors-normes. Je l’ai vraiment redécouvert dans QU’EST-CE QU’ON A FAIT AU BON DIEU ? où je le trouve hilarant ! Je suis très disponible pour ce genre d’exercice, j’aime recevoir l’énergie de mes partenaires sur un plateau.
Est-ce facile de trouver sa place face à cette machine de guerre du rire ?
Catherine Frot : Non pas toujours ! Ce qui m’a aidée, c’est le fait d’avoir à jouer une partition totalement opposée à la sienne et puis surtout, il y a entre nous un vrai respect de nos registres différents. MOMO est une sorte de curiosité absurde, comme dans les textes de Ionesco. On ressent également ça dans les décors très soignés qui rendent crédibles l’originalité du propos.
Un mot aussi de vos deux autres partenaires dans le film, Sébastien Thiéry qui joue votre « fils » et Pascale Arbillot dans le rôle de sa compagne.
Catherine Frot : J’aime beaucoup ces deux personnages qui amplifient la dimension très touchante du récit. On les croirait tous les deux quasiment sortis d’un film surréaliste, une sorte de couple à la Pierre Etaix ou Jérôme Deschamps ! Au final, vous avez André Prioux très concret, raisonnable, Laurence Prioux dans sa bulle inventée et puis « le fils » et sa compagne, dans une poésie qui dépasse l’entendement. J’aime beaucoup cela et j’espère vraiment que les spectateurs y seront également sensibles.
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